07 novembre 2010
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Beyrouth, le ventre de Beyrouth secoué par les bombes. Le ventre de Beyrouth le souvenir est frais, mais les ruines le ravivent. Je suis assise à côté de Mehdi sur le matelas par terre. La fenêtre ouverte donne sur un paysage lunaire. La fenêtre n’a pas été ouverte pendant très longtemps. Le vent soulève des bâches en plastique qui protègent les bâtiments de la pluie, mais pourquoi.
- T’as pas une clope Mehdi ?
- Tu fumes ?
- T’as pas une clope ?
Mehdi fouille dans la poche de son manteau évanoui à même les couvertures. Sort un paquet rouge et blanc. Sort une cigarette, me la tends. Le silence de Beyrouth prend de la place entre nous, ne nous laissant aucun autre choix que de regarder ailleurs. Il y a des choses inexplicablement lourdes entre un frère et une sœur qui mériteraient, je sais pas, d’être dites, d’être ries, de faire quelque chose avec en tous cas, et cela, à la seule condition de n’avoir pas nos tous petits bras. Ca pèse, ce n’est pas forcément gris ou noir, ça l’est pas d’ailleurs, mais c’est suffisamment singulier et fragile, on devrait s’y pencher.
Nos cendres goûtent sur la moquette, qu’il faudra ramasser tout à l’heure. Mehdi me regarde. Je voudrais fouiller dans ses cheveux. Lui dire que plus rien n’est triste. Lui dire qu’on est vivant. Que c’est mon frère, que je n’en ai pas d’autre, tout ça. J’ai envie de lui toucher les oreilles, taper sur ses épaules. Mon ventre se serre quand je regarde la forme de sa bouche qui est sensiblement la même que la mienne. Si l’on y pense, aucun être vivant sur la planète ne m’est plus proche que Mehdi. Scientifiquement je veux dire. A l’origine. Personne ne me ressemble plus que lui, et cette chose est implicite et cette chose contamine, positivement, négativement, l’ensemble de notre relation. Où l’on voudrait gommer la ressemblance, le lien revient plus dru, plus rêche, apparent comme la racine. Comme s’il n’y avait pas le choix de se dépêtrer d’avec ses frères. Comme si c’était obligatoire.
C’est l’histoire ancestrale des hommes, c’est aussi l’histoire de Beyrouth.
20:03 | Lien permanent | Commentaires (2)
Commentaires
(c'est pas le bon endroit mais ça fait rien, vous pourrez le supprimer si besoin)
Juste pour dire que j'ai adoré le 6h09-6h25 de ce matin Mercredi 10 Novembre (avant -> douche, après->rasoir...), et je suis prêt à rester barbu pour encore un peu de Princesse et de Nemours, d'ailleurs vous pouvez même aller jusqu'à 9h00, si vous voulez, quitte à devenir anachorète.
Écrit par : PhilippeC | 10 novembre 2010
Je transmets aux princesses...
Écrit par : mariemarie | 10 novembre 2010
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