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09 mai 2014

je t'aime

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Ceux qui appartiennent à nous gardent leur liberté. Nous ne reconnaissons aucune théorie. Nous avons assez des académies cubistes et futuristes : laboratoires d’idées formelles. Fait-on l’art pour gagner de l’argent et caresser les gentils bourgeois ? Les rimes sonnent l’assonance des monnaies et l’inflexion glisse le long de la ligne du ventre de profil. Tous les groupements d’artistes ont abouti à cette banque en chevauchant sur diverses comètes. La porte ouverte aux possibilités de se vautrer dans les coussins et la nourriture.
Ici nous jetons l’ancre dans la terre grasse.
Ici nous avons le droit de proclamer car nous avons connu les frissons et l’éveil. Revenants ivres d’énergie nous enfonçons le trident dans la chair insoucieuse. Nous sommes ruissellements de malédictions en abondance tropique de végétations vertigineuses, gomme et pluie est notre sueur, nous saignons et brûlons la soif, notre sang est vigueur.

(...)

Les écrivains qui enseignent la morale et discutent ou améliorent la base psychologique ont, à part un désir caché de gagner, une connaissance ridicule de la vie, qu’ils ont classifiée, partagée, canalisée; ils s’entêtent à voir danser les catégories lorsqu’ils battent la mesure. Leurs lecteurs ricanent et continuent : à quoi bon?
Il y a une littérature qui n’arrive pas jusqu’à la masse vorace.Chaque page doit exploser, soit par le sérieux profond et lourd, le tourbillon, le vertige, le nouveau, l’éternel, par la blague écrasante, par l’enthousiasme des principes ou par la façon d’être imprimée.

(...)

Je vous dis : il n’y a pas de commencement et nous ne tremblons pas, nous ne sommes pas sentimentaux. Nous déchirons, vent furieux, le linge des nuages et des prières, et préparons le grand spectacle du désastre, l’incendie, la décomposition. Préparons la suppression du deuil et remplaçons les larmes par les sirènes tendues d’un continent à l’autre. Pavillons de joie intense et veufs de la tristesse du poison.

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Écrit par : Alexeï | 09 mai 2014

Quatrains de Mawlâna



Allons, aujourd'hui, j'irai ivre,
Me faire d'un crâne une coupe et un calice
J'erre aujourd'hui ivre par cette ville ;
Je cherche un sage pour le rendre fou.

Notre ivresse ne provient pas du vin vermeil,
Et ce vin n'existe que dans la coupe de mon imagination.
Tu es venu pour répandre mon vin ?
Mais le vin dont je m'enivre est invisible.


Quand je m'embrase du feu de mon essence
Je voudrais t'oublier un instant.
J'ai une âme qui enivre la raison,
Viens dans ma coupe, je te boirai toi-même.


O jour, lève-toi ! Des atomes dansent.
Les âmes, éperdues d'extase, dansent.
La voûte céleste, à cause de cet Etre,danse,
A l'oreille je te dirai où l'entraîne cette danse.


Nous avons appris à l'ami ( ...) à boire le vin.
Nous possédons le feu de l'amour qui brûle l'amour même.
Depuis l'éternité le temps ne nous a pas vus dormir,
Pendant toutes ces nuits que nous avons changé en jour.


Je ne suis pas moi-même, tu n'es pas toi, tu n'es pas moi ;
Et cependant, je suis moi, tu es toi et tu es moi.
L'état où tu m'a mis est tel, ô idole de Khotan
Que je ne sais si je suis toi, ou si tu es moi.


J'étais un homme pieux, tu as fait de moi un chanteur
Un pilier de cabaret toujours assoiffé de vin.
J'étais assis gravement sur mon tapis de prière,
Tu as fait de moi la risée des enfants du quartier.



Nous le nommons tantôt le vin, et tantôt la coupe,
Tantôt l'or, ou bien l'argent brut.
Tantôt l'appât, tantôt le gibier, tantôt le piège.
Mais pourquoi toutes ces métaphores ? Pourquoi ne pas dire son nom ?


O âme du monde, j'ai perdu et l'âme et le monde,
O ma lune, j'ai perdu et la terre et le ciel.
Ne mets pas la coupe dans ma main, porte la à ma bouche,
Car enivré de toi, j'ai perdu le chemin de ma bouche


Tu n'es pas fait d'eau et de terre,
Tu es hors de ce monde errant, ce monde d'eau et d'argile.
Le corps est un ruisseau, l'âme l'eau de Jouvence qui y coule...
Là où tu te trouves, tu ne te soucies ni de l'un, ni de l'autre.



Je suis cette âme unique qui possède cent mille corps.
Mais que faire ? J'ai la bouche scellée!
J'ai vu une multitude d'homme qui tous n'étaient que moi-même :
Mais entre tous, je n'ai pas vu celui-là même que je suis.


Tu es l'âme et le monde ; le monde est heureux avec toi.
Si même tu me blesses, si cette blessure provient de ta dent, ô douceur
La poussière de ta main est l'or de l'alchimie,
Celui qui n'est pas bon, le devient avec toi.


Ta perfection m'a appris ce qu'était l'amour,
Ta beauté m'a appris à rimer des odes.
Ton image danse sur l'écran du cœur,
Et cette image m'a appris à danser


Il est un désert hors de l'islam et de l'infidèle,
Au centre de cet espace habite notre amour.
Quand l'amitié y arrive, il y pose sa tête ;
Car en ce lieu il n'y a point d'islam et d'infidèle, ni même de lieu.


La nuit dit : «Je suis le compagnon des buveurs,
Je suis l'âme de ceux qui ont le coeur brûlé,
Et pour ceux à qui le destin n'a pas accordé l'amour,
Je suis chaque nuit l'ange de la mort. »


Tu es partie : ton départ m'arrache des larmes de sang,
Mon angoisse toujours accrue accroît mes larmes.
Tu n'es pas partie seule, mes yeux sont partis avec toi :
Puisque je n'ai plus d'yeux, comment verser des larmes ?


Nous qui, sans coupe et sans vin, sommes contents,
Nous qui, honnis ou louangés, sommes contents.
« A quoi aboutirez-vous» nous demande-t-on;
A nous qui, sans aboutir à rien, sommes contents.


Bien que je ne sois pas beau, j'aime la beauté.
Je ne puis être du vin, cependant, je suis ivre de vin.
Je ne suis pas un homme pieux, soit.
Du moins je suis de ceux qui s'enivrent à la taverne.


Quel jour est donc celui-ci ? L'éclat du soleil est double.
Un écho de la voûte céleste se fait entendre sur terre.
Aujourd'hui ne ressemble pas aux autres jours,
O amoureux sans espoir ; bonne nouvelle, votre temps est venu !


Il n'existe dans l'amour ni sublime, ni bassesse,
Ni sottise, ni esprit.
Ni hafiz, ni cheikh, ni derviche;
Il faut être vaurien, cynique, débauché.


Que peut faire un amoureux sinon s'humilier ?
A quoi passerait-il ses nuits, sinon à rôder dans le quartier de l'Aimée ?
Ne t'étonne pas s'il baise tes cheveux bouclés ;
Que peut faire un fou, sinon mordre ses chaînes ?


Sache que ton âme ressemble à une caverne,
Dans laquelle il y a un étrange bazar.
Chacun a sa Bien-aimée et agit comme il lui plaira,
Mais cette Bien-aimée est mystérieuse et étrange !


Notre corps pétri de terre est la lumière des cieux.
Les anges sont jaloux de notre pénétration.
Tantôt notre pureté rend jaloux les esprits célestes,
Tantôt les démons s'enfuient loin de notre impureté.


Autrefois, nous étions des enfants, puis nous fumes maîtres
Autrefois nous étions heureux de voir des visages amis.
Écoute la fin de notre aventure :
Nous sommes devenus pareils aux nuages, pareils au vent.


Tous les atomes qui se trouvent dans l'air, et dans le désert,
Sache bien qu'ils sont épris comme nous.
Et que chaque atome, heureux ou malheureux,
Est étourdi par Ie Soleil de l'âme inconditionnée.


Je suis l'Océan tout entier, non pas une goutte !
Je ne suis pas un orgueilleux aux faux regards.
Chaque atome à qui je parle en mon muet langage,
S'exclame sans tarder: « Je ne suis pas un atome! »


La bien-aimée est devenue pareille au soleil,
L'amoureux, tel un atome, se met à danser.
Lorsque tremblote la brise du printemps d'amour,
Chaque branche qui a quelque feuille se met à danser.


La bien-aimée murmurait des paroles indistinctes,
Ma raison s'est égarée ; il ne m'en est rien resté !
Mon Dieu ! elle devait prononcer une incantation,
Car la trace est gravée dans mon coeur de pierre.


Tu me dis que je suis fou et extravagant.
C'est toi qui est folle de chercher la raison dans un fou.
Tu trouves que je suis imprudent et inflexible,
C'est la sphère elle-même qui est inflexible.


Dès que }'entendis le mot amour,
J'ai usé mes yeux, mon âme et mon coeur sur son chemin.
Je me suis dit que, bien que l'amant et l'aimée soient deux,
En vérité ils ne sont qu'un et je devais y voir double.


Je suis ivre de toi... non de vin, ni d'opium,
Je suis fou, ne cherche pas la raison chez un fou.
De mon âme débordante naissent mille fleuves,
De ma danse tournoyante, le monde est étourdi.


En voyant mon teint jauni, cette idole célèbre,
M'a dit: « N'espère plus que je sois à toi»
«Tu as été mon amant pendant cent lunes
Maintenant tu as la couleur de l'automne, moi je garde celle du printemps»


En souvenir de ta lèvre, je baise le rubis de ma bague ;
N'ayant pas celle-là, je baise celui-ci.
Ne pouvant atteindre ton ciel,
Je me prosterne et je baise la terre.


Pourquoi rôdes-tu dans le quartier de ton imagination,
Que laves-tu avec les larmes de sang de ton coeur ?
De la tête jusqu'aux pieds tu es le Vrai ;
Que cherches-tu, ô ignorant de toi-même ?


Ne dis pas : « La nuit» Notre jour n'a pas de nuit ;
Dans la secte de l'amour, il n'est d'autre secte que l'amour.
L'amour est un océan sans fond, ni rive ;
Bien des hommes s'y noient sans plaintes et sans lamentations.


L'amour est un grand bien qui produit de grands maux.
L'amoureux ne doit pas éviter ces maux.
Dans l'amour, le vaillant c'est celui
Qui lorsque l' arnour l'attaque, capitule.


Qui est plus malheureux qu'un amant désespéré ?
II n'y a point de remède au mal d'amour.
Ni l'avarice, ni l'hypocrisie ne guérissent le chagrin d'amour;
Dans le véritable amour n'existent ni fidélité ni cruauté


.On a pétri l'argile de l'homme avec la rosée d'amour,
Et mille troubles, mille désordres naissent dans le monde.
Les mille lancettes de l'amour ont piqué les veines de l'âme
Pour y prendre une goutte; et cette goutte s'appelle : le coeur.


Puisque ton amour réside dans l'essence du ciel,
La discorde et la querelle envahiront jusqu'au trône,
Le monde est devenu une âme en tous sens ouverte,
Et ton amour pénètre cette âme d'en haut.


La nuit vient de passer... mon ivresse continue.
Sous ton empire, je m'occupe de mes propres affaires.
Je suis à la fois l'amant et l'aimé.
Je suis à la fois le bouquet, le rossignol et la rose de moi-même.


Le rossignol est venu au jardin, les corbeaux se sont enfuis ;
Allons au jardin ensemble, ô flambeau de mes yeux.
Comme le lys et la rose, épanouissons-nous dans l'extase ;
Comme l'eau qui court, courons de jardin en jardin.





Rûmi

(Rûbâyyâtes)

Écrit par : .. / dd | 13 mai 2014

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