12 janvier 2011
piéta sans larmes et vieux mascara
Et cette cheville droite, cette cheville droite… trop joufflue, pas assez cheville, portant trop bas le poids du mollet. Ne se dessinant pas, ne répondant pas à ce que l’on attend d’une cheville normalement.
Et ce genou gauche, et ce genou gauche. Pas assez rond ni menu. Ni celui de Claire, ni celui de personne. Le genou ne va pas non plus.
Et mon ventre tu l’aimes mon ventre ? et mes seins ? Et la peau de mon cou ? Si belle il y a vingt ans dans un rayon de lune. Si offert, si lisse, menant si bien au début du visage. Tu l’aimes la peau de mon cou ?
Face au miroir, un long t-shirt blanc pour chemise de nuit. Défaisant les boucles d’oreilles, défaisant l’apparat qui détourne les yeux des ridules et des taches, elle tremble ces cinquante ans.
Y’a vraiment pas de quoi pourtant. Simplement c’est vrai que les contours n’y sont plus tout à fait règlementaires. Pas aussi parfaits que le voudraient les grandes affiches. Pas aussi réussis que promettaient les annonceurs.
Une femme de cinquante, quoi, qui a aimé, qui a couru, qui a fait des enfants, et qui s’est assise, il y a peu // pour souffler.
Qui a demandé au miroir, si oui ou non elle était encore la plus belle, et a laissé au miroir le soin de la réponse, alors que le miroir… ne sait pas, lui. Le miroir se plante, toujours. Ignorant. Rendant aux choses leur plat reflet. Le miroir a dit non. Ca fait longtemps que tu n’es plus la plus belle, bien longtemps. Et bêtement, elle a cru.
Elle est debout devant. Immaculée dans cette chemise informe, Pieta sans larmes. Vieux mascara. Epuisée de sa lutte avec le temps qui passe, et au risque de la contredire,
elle est magnifique.
08:11 | Lien permanent | Commentaires (1)
Commentaires
Bravo, je dis et répète bravo.
Ce texte est tout simplement sublime. Constat abrupte d'une femme sur le temps qui passe. Mais on le sait tous, les femmes seront toujours belles !
J'avoue, je suis jaloux. J'aurais aimé l'écrire.
Merci d'avoir répondu à mon courriel aussi rapidement.
Philippe (Auditeur assidu du premier jour)
Écrit par : Philippe SURELLE | 13 janvier 2011
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