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12 janvier 2011

ce qui d'avance console

Elle est juchée sur la pointe des pieds. Reste perchée et comme l’oiseau refuse de descendre. Elle est de dos. Sa colonne vertébrale est encadrée, littéralement encadrée par de longs muscles qui la maintiennent et la dessinent. Nu jusqu’à la taille. L’homme lui passe délicatement le bras dans la manche droite. En soupèse le poids. En empoigne la chair. Elle est toujours de dos, ce que l’on perçoit de son visage se résume à un morceau de joue, bombée dépassant du profil, et encore, l ‘on est devin. Il passe son deuxième bras dans l’autre manche, pliant lui même le coude, comme on ferait d’un enfant, d’un pantin. Elle n’est plus l’un certainement pas l’autre. Vivante sur pointes de pieds. Mollets tendus ventre tendu et nuque molle. Le tissu est béant et recouvre maintenant les flancs, laissant entre les boutons non encore attachés, la peau, mi soyeuse mi rêche, matière encore accrocheuse de la sortie du bain. Il ferme le premier bouton. Ses mains froides la font tressaillir un brin, puis plus rien. Silence des corps et concentration ultime pour le second bouton, le troisième, le dixième. Cette robe n’est que boutons de dos et ce qui tout à l’heure l’avait effrayé, muscles tremblants et doigts malhabiles, le rend, là, joueur sublime, insoumis à la pesanteur.  Elle,
se prête au jeu. Devant la vitre immense, précédée d’une table où refroidissent des tasses de thé et de café, où patientent quelques fruits,  où se consument encore deux fins de cigarettes. Ils sont deux, vraiment deux. Il regrette d’arriver bientôt au dernier bouton qui finira de recouvrir son dos et refermera comme la robe, la parenthèse ouverte par ces quatre dernières heures. Mais elle finira bien par redescendre, de nouveau pied à terre, finira bien par se retourner et cela, cet unique présage, la promesse du visage de nouveau offert, vaut mieux que consolation.

 

Commentaires

12/1/2011
A l’aube j’ai compté les miroirs que je connais Marie. J’aime votre émission car elle induit à la réflexion dès 6h21 le matin.
Il y a celui de la marâtre de Blanche-Neige évidemment, qui lui renvoi son image épidermique en lui occultant sa vraie nature. Il y a celui d’Henry Potter qu’ignore la réalité et lui montre ses désirs, et il y a celui d’Alice à travers lequel il est possible de rêver, voire de fantasmer, en temps réel. Aussi, il existe des lieux ou des objets faisant fonction de miroir : le bouclier étincelant de Persée qui renvoya sur Méduse son regard pétrifiant, une source d’eau limpide où Narcisse découvrit sa beauté suicidaire, ou le portrait de Dorian Gray qui, en vieillissant en son lieu, lui montrait l’inéluctable auquel il n’aurait su s’échapper. Il y a un zest de magique et de pervers dans les miroirs auquel les mythes et la poésie ont toujours succombé car, comme les mythes et la poésie, ceux-ci nous montrent ce que nous ne voulons pas voir ou n’avons pas le courage de regarder. Mais il existe un autre miroir que les scientifiques connaissent fort bien, le seul qui renvoi une image vrai, solide, « a tutto tondo » de ce que nous sommes, plutôt que de ce que nous aurions pu ou voulu être. C’est le jugement toujours lucide de ses paires. L’équivalent pour votre femme grisonnante déçue par ses premières rides et par sa taille qui n’est plus de guêpe ? Les yeux de ceux qui l’aiment, dans lesquels elle découvrira que l’âge n’a aucune prise sur sa beauté, car ce que celle-ci détruit, s’efface devant à ce qu’en cinquante ans elle aura su construire. Ah Mariemarie, pourquoi avez-vous cédé ce précieux dernier quart d’heure de mon réveil?
lvm

Écrit par : Lucio Margherita | 12 janvier 2011

merci
pour les miroirs `


ce quart d'heure antenne n'est pas à moi plus qu'à quiconque..... alors alors....
on va s'habituer non ?

Écrit par : mariemarie | 12 janvier 2011

Enfin! Je guettais tous les jours un nouveau texte affiché sur votre blog et me languissais.
Je n'ai découvert que récemment votre émission. Je ne pratique pas les fonds sonores et n'écoute que rarement la radio.
Mais votre "Pola" comme vous dites fait désormais partie de tous mes matins.
Vous m'aviez parlé de votre idée de réunir vos textes en un "joli petit livre". Il serait indispensable d'y adjoindre un Cd puisque
vous transportez les sons en formes, silhouettes et couleurs que seule votre voix apprivoise.
Je m'enrichis et je m'émerveille en vous écoutant. Je pensais ne plus en être capable.
Posterez-vos "Le Premier Matin" du 7 janvier. J'en ai aimé la mélancolique résignation et le train qui "radote, recommence, redémarre et s'arrête". Il faut faire avec dites-vous, ce qui n'est pas se soumettre
ni subir, simplement tenter d'atteindre sans trop de dommages le prochain arrêt.
"Et j'en dirais, et j'en dirais
tant fut cette vie aventure..." écrivait Aragon.
Je n'ai rejoins que récemment ce pays dont j'ai été absent un peu plus de quarante ans et je vous remercie de me réconcilier avec une beauté
sensible que je ne retrouvais plus.
À demain.

Écrit par : Jacques Auger | 12 janvier 2011

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