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01 février 2011

rouge pour deux

Le bus vient de dépasser les quartiers touristiques de la ville. Il s’est vidé des apprentis photographes et autres familles polyglottes, et ne compte à bord que quelques vieilles dames se rendant aux courses et une dizaine d’étudiants entre deux dissertes. A l’avant, un homme et une femme se font face. Elle est assise dans le sens de la route. Lui, à rebours.
Elle sort de son sac une petite trousse en cuir et un tube de rouge à lèvres avec lequel elle entreprend soigneusement de se repeindre les lèvres. Le rouge carmin fait ressortir la pâleur hivernale de sa peau, puis ses yeux. Marron comme le bois brun…….. inondé de pluie.
Marron comme le fer ancien de la tour Eiffel. Marron comme des yeux. Un petit miroir de poche cache une partie de son visage, mais la vitre du bus la dévoile autrement. L’homme la dévisage. Son regard souligne les gestes qui eux mêmes soulignent les lèvres. La femme ferme dans un « clap » le miroir qu’elle glisse comme un billet dans la pochette en cuir. Avant qu’elle n’ait le temps d’en faire de même avec le bâton de rouge, l’homme hésitant, gigotant sur son siège : «  Vous permettez ? »
Après un léger sursaut, la femme regarde le bâton de rouge, regarde l’homme, regarde de nouveau le bâton, l’homme acquiesce timidement. La femme le lui tend, comme on offre un baiser, un chocolat. L’homme se retourne vers la vitre, s’en approche et recouvre lentement les lèvres qui rougissent  à leur tour. Fermant soigneusement l’ustensile il le rend. La femme le range dans la pochette, et la pochette dans le sac.
Les voilà tous les deux, face à face, les lèvres peintes de la même couleur, suivant du regard la ville qui se dérobe. Un léger pli fait sourire leurs joues.

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