07 juin 2011
pas d'enfants écrasés.
Voyez le bout du chemin caillouteux. Pas d’arbre tout du long. Un désert dans chaque poche. Voyez le bout de ce chemin là, c’est leur espoir. Ils sont dix sept, ils ont des courtes vestes à leur taille, des pantalons au dessus des chevilles et des godillots trop grands. Ma foi, ils ont belle allure ces mômes. Ils marchent d’un pas décidé. Il y en a devant, une tête de plus que les autres, les yeux suspendus, et les épaules fiérotes. Ils s’appellent Karl.
Au bout du chemin, après le poteau électrique à la gauche de la gauche, un hangar. Le soleil est peint dans la poussière, il entre par effraction des fenêtres cassées. Qui les a cassé ? Qui a cassé les fenêtres du hangar. Personne répond.
la petite troupe s’active, récupérant ici et là des cartons, des bouts de bois, de lourdes pierres qu’ils roulent. Qu’ils poussent qu’ils déplacent, qu’ils organisent.
Bientôt d’une cage à poule, ils ont fait une estrade, de deux piquets de ferraille, un pied de micro brinquebalant. Au gros scotch ils ont fait tenir cela ensemble. Ils ont la mine concentrée d’un enfant qui dessine. Et ils dessinent en somme. C’est cela qu’ils font dans le hangar. Sur les pierres disposées en arc de cercle ils se sont assis, le gros du groupe, les genoux remontés sous la gorge, ils se sont assis là.
Le grand, celui dont la tête dépassait tout à l’heure, s’est approché du pupitre. Des pages de livres découpées sortaient de sa chemise. Des livres qu’il n’avait pas lu évidemment, mais qu’il gardait contre la poitrine. Il fit mine de tapoter sur le micro qui n’existait pas. Il se racla la gorge devant les autres, impatients. Leurs toutes petites bouilles, épatées, salies sur les joues, et les dents dégueulasses. Ils étaient, foule miniature et disparate, pendus à ses lèvres. Karl se mit à parler, avec des mots qui remontaient dans leurs veines comme du sang chaud, vrai sang. Alors les joues de marron boue passèrent à rose vif. Croyants, convaincus, ils reprenaient ses fins de phrases. Ces gosses, dix/ onze ans à tout casser, ils préparaient quelque chose, et j’en mettais ma main à couper. Ca n’finirait pas mal.
17:15 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marie richeux
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