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24 mars 2012

ça caille quand même

Cet escalator existe depuis que l’esplanade existe. Lorsqu’on est sur les marches mécaniques, et qu’on monte ;  les tours, et les fenêtres dans les tours, et la lumière dans les fenêtres des tours, apparaissent étage par étage, se découvrant, se laissant voir, sauf les jours de brouillard. Et on y est. Précisément, dans le brouillard. Jasmine est assise sur le seul banc qui ne soit pas pris par le gel. Elle agite ses jambes moins pour les réchauffer que pour calmer ses nerfs. Aldine apparaît derrière le restaurant thaïlandais. Les mains dans les poches. Moins pour les réchauffer que pour leur trouver une place. Aldine approche. Il la salue. Il s’assoit. Ils se connaissent, ça va, pas la peine de…
Comme deux vieilles à l’arrêt de bus, ils se mettent à parler du temps. Ca caille quand même. Moi dimanche, j’ai pas mis un mollet dehors. Ça caille non ? Jasmine fait oui de la tête. Elle s’en fout. Lui aussi. Mais elle renchérit.
D’après toi, à partir de quel moment on peut dire que c’est vraiment l’hiver, tu vois, genre, une fois qu’on a passé le 21 décembre, qui décide que oui vraiment c’est l’hiver ? Et les lèvres souriantes et gercées de Jasmine trahissent, la falsification de la question. Son inutilité de surcroit. Elle est jolie.
Aldine regarde ailleurs, comme ils ont bien appris à le faire, puis revient à elle. Je sais pas, je dirai que ça dépend de la fumée. Si tu commences à faire de la fumée quand tu parles, quand tu respires, pas à 6 heures du matin, mais genre là, à 13 heures, ça veut dire c’est l’hiver. Tu vois là, avec la fumée, nos deux fumées. Ca veut dire c’est l’hiver. Et Aldine embrasse Jasmine. A moins que l’inverse soit tout aussi vrai. La fumée disparaît. Leurs deux fumées disparaissent. L’hiver aussi.

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