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31 janvier 2012

penche

IMG_2210.JPG

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JE
CONCOIS
QUE CELA
SOIT
INDIGESTE
ET M'EN
REJOUIS
FINALEMENT

pas d'amour aujourd'hui

Une table en formica. Une fenêtre mal fermée. Un appartement au rez de chaussée. Une fenêtre mal fermée donnant sur la rue. Une table en formica dans une cuisine. Un appartement dépeuplé. Une table en formica que l’on voit par la fenêtre. Une fenêtre donnant sur la rue.

Schön est debout devant la gazinière et regarde l’eau bouillir. La chute de son pantalon est arrêtée par le léger rebond de ses fesses. Il est torse nu il a dormi comme ça. L’oreiller, les draps, le duvet de Filip ont marqué ses joues. Ses yeux sont encore gonflés d’herbe et d’alcools et ses sourcils tombent assez bas. Il regarde l’eau bouillir. Après quelques minutes il attrape un paquet de filtres sur l’étagère, et dépose du café, place le tout au dessus d’un bol. Baille et allume une première cigarette, l’éteint la minute d’après et fait passer l’eau. Le café fume dans la tasse.

Une table en formica. Une fenêtre mal fermée, un trottoir donnant sur la fenêtre. Une bouteille de lait, sur la table. Shön boit son café noir. Filip est parti. Un appartement au rez de chaussée, une rue donnant sur la table, une bouteille de lait dansant sur le trottoir. Schön boit les première sgorgées de café chaud, c’est retour de la vie dans quelques uns de ces membres fourbis de sommeil.

Une bouteille de lait sur la table, une bouteille de lait sur la table, une bouteille de lait sur la table. But no milk today

ni comprendre ni déborder

IMG_2190.JPGLe vent est monté ce matin. La mer est devenue forte. Dos rond, bleu accidenté, gris. La mer a souri, mais gravement. Les fougères se sont couchées sous le vent et au passage des chevaux. Les hommes n’ont su que dire aux bêtes. Décembre rendait le sable brillant, et si la nuit tombait tôt, le jour n’en était que plus franc.
Elle s’était assise dans la dune, à même le sable froid et humide. Elle avait remonté sa veste au dessus de ses oreilles, et le col lui barrait le menton et les joues. Ses yeux pleuraient sans déborder.
Il s’ était assis sur la roche et laissait trainer quelques doigts transis par le froid dans une petite piscine d’eau de mer.
Ils ne se voyaient que parce que l’un et l’autre se savaient présents. Ils étaient tous les deux des brèches dans le paysage. Ils étaient tous les deux des mirages en somme, des corps d’entre deux mondes.
elle se mit debout et sa silhouette si fine, si fine prenait le vent, manquait de flancher toutes les secondes, manquait d’être emportée comme les algues sèches qui couraient sur la plage. Il se mit debout de l’autre côté, protégeant de ses mains son visage de l’air brutal, et criant dedans. Quel est ton nom.
le vent se chargea de rendre le message inaudible. Quel est ton nom, répétait-il sur la roche, quand elle était là-bas sur la dune, quel est ton nom ?
Toujours debout, elle regardait sans comprendre, ses yeux pleuraient sans déborder.

et ils sont comme une pointure en pointillés

Il y avait ce genre d’immenses passerelles dans la gare de l’est de Berlin. Je ne sais plus exactement quelle était cette gare en fait. Je sais que j’avais marché de longues heures, en longeant des parkings, qu’il y a avait là bas aussi, des magasins comme leader price, ou Ed, des magasins où tout était disposé à mêmes les cartons, près de murs jaunes ou bleus et souvent remplis. Des magasins où il était normal de ressortir avec paté et baguette, seulement.
Oublions Berlin. Nous sommes autre part. Même passerelle, mais moins haute. Il est 7 heures. Une voix dans le haut parleur doit l’avoir dit dans cette langue qui nous échappe totalement, mais ma foi, commençant de connaître la ville et ces lumières, nous jugeons sérieux qu’il soit sept heures. Il y a un brouillard halluciné au dessus des voies, au point qu’il nous semblerait, à moi, à lui, que les voies se jettent dans une mer de nuages. Ce serait beau s’il n’y avait ne serait-ce qu’une toute petite chance pour que ce soit vrai, mais non, alors ce n’est pas si beau que ça. De part et d’autre des voies, des entrepôts ajoutent du brun à cette masse fumeuse. Sur les toits, sur les toles, des centaines de corbeaux noirs, se posent et s’envolent. Ils le font en criant évidemment. Ils le font en jurant sur nous dans le ciel. Ils s’envolent, ils reviennent, ils font hésiter le jour. Si on regarde bien, très profondément, si on essaie de percer l’image, on se rend bien compte que le jour ne tient qu’à eux. A leur simple volonté. Ils le tirent ou le rabaissent. Tout dépend ce matin des corbeaux au dessus de la gare et ils sont comme une peinture en pointillés.

c'est évidemment lui mon fiancé

Voyez, elles ont mis leurs chapeaux, fières du dimanche. Les dames blanches, sont de riches héritières. T’as pas idée des comptes en banques, elles mêmes ne comptent plus. Il y a des sommes, c’est plus la peine, c’est passée la barrière, dépassés les bouliers.  C’est la tête en vrac des banquiers, devant leurs décolletés pigeonnants. Sur le champ de course, elles arrivent en masse, paillette, strass collés au palais, tandis qu’à la maison s’affairent, les valets en culotte mauve. C’est dimanche, et c’est particulier. La course, elles ont parié, que celui qui gagne, est celui le plus libre. Le cheval le plus fou, ce lui qui galope et qui défie les vents. Celui-là, elles l’aiment. Elles y mettent les sous. Le cheval le plus fou, je donne ma langue au chat, je donne ma somme au guichet, je lui donne, tout, redonne, celui qui galopera, sans jockey sur son dos, je fais de lui le roi. Elles ont la belle tribune, évidemment, blondes et brunes se partagent les bancs. Le pistolet déchire le ciel, et dans une fumée d’archange, les chevaux donnent le change, et s’élancent sur le champ. Pas de bataille, pas d’obstacles, ils n’ont pas de numéro collé au flanc. Ce sont des enfants. Ils courent au plus rebelle.  Et toutes les gonzes d’hurler, c’est lui mon fiancé.

la quadrature

IMG_2135.JPGToi tu pars moi je reste deux fois. C’est la condamnation. Toi tu pars, moi je regarde augmentée, lestée, alourdie de tes yeux.
Toi tu es autre part, moi je suis ici, dans le même fauteuil près de la fenêtre, où ton corps alangui et longiligne roule des joints, et fume des clopes.
Près des canisses bousculées par le vent, j’avale la fumée pour deux. Je suis quadruple poumons en berne, sous le bleu des néons fatigués. Au lieu de retrancher quand tu meurs tu ajoutes. Quelque chose de plus à nos vies à tous, quelque chose qui serait la pensée de toi, mais en plus dense. En plus permanent. Véléda indélébile, la trouille des instit, quand tu meurs, crois pas que tu t’en vas. Personne n’accepte plus les ainsi font font font les petites marionnettes.  Quand tu meurs, tes jambes marchent à côté des nôtres, trop grandes comme avant, trop gourmandes de bitume. Quand tu meurs crois pas que tu t’en vas. Ton nez respire à l’intérieur de nos narines quelque chose de plus encore, que le vent et les gelées. C’est du fil à retordre pour nos têtes, tes clopes éteintes mais consumées sur le rebord du balcon, et où tu fumes maintenant ? C’est une vieille chanson qu’on avait en tête, tous les deux, gravée sur un vinyle, qui tournait encore après que ton corps fut balancé dans les cendres.
Une chanson volatile, pour les poussières d’étoiles, quelques trop légères notes, déposées comme une gerbe.

Toi tu pars, peut être, mais nous on reste deux fois.

les pièces uniques pensa-t-elle

Elle ramassait. Coupon de la poste. Aller chercher un colis. Le faire tout de suite. Mettre l’anorak. Aller chercher un colis sous la pluie de suite, en anorak, car c’était la meilleure façon de retrouver la France, souriait-elle.
Dégoulinante elle tendait ses papiers au guichet «gagner du temps», le type était souriant, elle n’avait pas oté les écouteurs de ses oreilles. Ce qu’il pouvait dire serait inévitablement mélangé avec ce qu’elle pouvait écouter. Il ne dit presque rien, ça tombait pas mal. Elle prit le paquet. Long. Dans la longueur le paquet. Elle le posa sur une petite table au milieu de la poste. L’espace, en une seconde se restructurait autour d’elle et les yeux aussi certainement. Elle cherchait une clé pointue pour fissurer le scotch. Elle le fit mal, salement. Elle finit par tout déchirer du carton. C’était un écrin de papier beige, où il était écrit comme brodé «  Pièces unique ».  Elle sentit ses yeux se remplir de larmes. Il n’y avait aucune lettre. Tous les employés de la poste la regardaient. Elle ouvrait l’écrin de papier. Un pendentif en porcelaine tombait doucement au bout d’une chaine dorée. Laiteuse, blanche, la porcelaine. Mate. Les pièces uniques, pensa-t-elle immédiatement, ce sont les gens qui savent précisément quoi accrocher à votre cou.