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09 juin 2013

creuse la pierre

J'ai maudit, machinalement, le sort inique qui m'avait livré des choses sans explication ou des explications sans les choses assorties, imposé des fréquentations superflues, ennuyeuses, et privé jusqu'à la fin et au delà, de celles qu'il aurait fallu.
Elles détenaient la réponse.

Mieux, elles auraient ratifié, légitimé, des questions que je me posais et qui, de rester sans echo, m'avaient fait craindre d'avoir la cervelle dérangée, de ressembler, à ma manière bénigne et contenue, puérile, au fou furieux du fisc.
Et puis j'ai songé que j'avais lieu de me tenir heureux que l'explication me soit livrée enfin. C'est que le temps ne passe pas vraiment. Il persiste en nous, à proportion de ce qu'on n'a pu lui être présent dans toute la mesure où cela se pouvait, où on le voulait, quand c'était le moment.
Des choses nous ont nui pour garder leur secret. Elles ne nous ont pas dit quelles elles étaient.
Et alors on n'a pu être soi-même.
Une part de ce qui nous affecte et en quoi, par suite, on consiste,
est restée entre leurs mains et nous a donc manqué, diminués.

 

____ GEOLOGIES___PIERRE BERGOUNIOUX__ page 43-44 ( miam )

07 juin 2013

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JE SUIS SOLEIL
TU ES SOLEIL
IL ELLE EST SOLEIL
NOUS SOMMES SOLEIL
VOUS ETES SOLEIL
ILS ELLES SONT SOLEIL
ON EST SOLEIL
ENFIN ENFIN ENFIN











le cap de Bonne-Espérance

 jean cocteau

Pour quel motif avez-vous déserté ?" demande le Président au prévenu. 

LE PREVENU. __ J’avais demandé une permission qui m’avait été refusée. Pourtant j’avais besoin d’aller chez moi à Stains, près de Saint Denis. J’avais là des pommes de terre à arracher, ça ne pouvait pas attendre. Quand je suis arrivé chez moi, je me suis mis aussitôt à la besogne et j’ai travaillé ferme. Lorsque mes pommes de terre ont été arrachées je suis revenu en hâte. Je ne croyais pas avoir commis une désertion.
LE PRESIDENT. __ Nous sommes en temps de guerre vous semblez l’oublier, et quitter son corps pour aller arracher des pommes de terre dans son champ ne saurait être toléré ! Ce n’est pas un motif sérieux.
LE PREVENU. __ Il fallait bien que mes pommes de terres soient arrachées. 


29 septembre 1916

04 juin 2013

un matin du temps de paix, de vrais enfants.

02 juin 2013

d'ici on entend les coqs chanter sur Tanger

je te prends par l’est et par l’orage.
j’exige le matin, et des chèques en bois, à Stéphan, Reiner, Susan. je rêve que je les emmène tous sous le bras, par les lacs, par l’est et par l’orage, n’aime pas la compagnie des morts, mais je découvre combien c’est vaste
la mer est jetée à l’ombre, ainsi que toutes les prévisions, nous les laissons à l’ombre, je déménage à Prague,
sur les trottoirs mouillés par la crue, j’escalade le château, vers novembre, vers sept heures, il y a toujours cette même brume à badigeonner. c’est infiniment beau et ne se traduit que trop mal en français. je continue de chercher. je relie.
je rêve de chevaux endormis dans les coffres des matelas, et de gitans avec qui l’on négocierait le prix.
le tissu pour les tapis de dos.
j’ouvre les yeux sur le trajet.
pas trop bas. pas trop haut. j’en ai rêvé deux fois.
juste l’égal échange. eux : la thune. moi : je tisse. et les chevaux dorment encore à cette heure.
je lèche tes seins et je découvre combien c’est vaste.
la moindre cicatrice au sol, je creusais. une sale habitude d’enfan. pourtant tout ce qui inspire n’aspire pas, et c’est une règle encore vraie. faudrait jamais laisser tous ces trucs dans leurs bouches,  ou les nôtres, car ça empêche de parler.
 

 

 

 

oceano mare

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31 mai 2013

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et la beauté.




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nous sommes jeunes et las et ne le disons que parce que sourd en parallèle l'étrange lumière d'une joie, à retordre pas à vendre.
cependant nous sommes las qu'une absence de saison nous mène droit au sentiment d'autres absences que le mot printemps ne saurait circonscrire. nous cherchons d'une marche lente un entrelacs d'images gravées sur bouclier. nous cherchons un air, qui défierait du même élan la pesanteur et la légèreté. et puis advient une déchirure blanche , secrète, un éclairage nouveau et vaudou, venu comme d'habitude de ce que d'autres furent las avant nous, probablement des mêmes maux, probablement dans les mêmes mots. qui est jeune ? qui est jeune encore ? qui est encore jeune ?

je l'écoute la joue sur le bras, la lèvre sur le micro, presque allongée sur le studio
"j'ai élevé mes deux guerriers de fils, comme mes enfants bien sûr et je continuerai de les protéger jusqu'à ce que mort s'en suive, j'ai fait avec mes enfants comme avec des enfants, mais aussi comme avec toi, et comme avec  tout individu que je viendrais de rencontrer.  je n'ai qu'un seul regret : n'avoir pas eu de fille"

mes yeux clignent comme la paupière neuve des bébés qui acquiescent. j'écoute l'humour se dérouler son propre tapis rouge, l'humour  qui toujours se fait preuve d'intelligence. de ceux qui se cachent  un peu pour penser. de ceux qui sont seuls, mais autre part, dans un monde impénétrable et délicat, délicat jusque dans la façon d'être retirés de la vue. pas planqués.

nous sommes les fils et les filles de___
putes, travelos, funambules, ramasseurs de balles, figurants rêveurs. mécaniciens et agriculteurs, vieille auteur irlandaise.
des outils nous en avons, mais il faut les défaire du moule. comme ce bâton de berger qu'on agite, ou je sais pas, peut-étre une perche tendue mieux que l'arc, jusqu'aux nuages et qui fait que depuis des jours, ça pleut. ça pleut. ça pleut. ça pleut. ça pleut. mais il fait tellement beau 

27 mai 2013

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"J’ai vu l’été sur la terre, paraissant ne pas se reconnaître lui-même,
naturel et antéhistorique, comme dans une révélation. J’ai laissé un
livre sur lui."

Pasternak, dans une lettre adresée à Rilke.1926.










26 mai 2013

aux heures de la nuit

 



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cette impérieuse nécessité du présent

 

«  C’est si important ce qu’il y a entre nous que même ce qui vient de se passer est incapable d’y changer quoi que ce soit.

Les rencontres ça n’a rien à voir avec quelqu’un, je veux dire avec un individu autonome. C’est seulement objectif, ça rend puissant et objectif et c’est tout. Il faut guetter. Après c’est fini. Comme nous sommes seuls au fond. Même dans la puissance d’une rencontre ce n’est pas vraiment avec quelqu’un que nous sommes. Ca n’existe que par nous, par notre propre lumière et après ça rentrera dans l’ombre et nous n’éclairerons plus rien. L’amour que j’avais pour lui qu’avait-il à voir avec lui en somme ? Et avec moi ? Pas grand chose sans doute, lui et moi ça ne suffisait pas. Ca se passait plutôt entre nous, je veux dire, dans l’espace entre nous, où prennent place les choses qui sont un peu en retrait. Peut être que ça ne veut pas dire qu’il faut oublier, peut être au contraire même ; mais justement, il faut que ça reste loin, comme quelque chose de vivant mais d’inatteignable, il le faut, parce que malgré tous nos efforts, nous ne pourrons pas rendre ça proche autrement que sous cette forme paradoxale et lancinante de proximité qu’est le souvenir.

Un élan ce n’est pas une chose, c’est un projet, une ébauche de chose
, un élan qui ne débouche jamais sur rien, qu’est-ce que ça peut être ? Qu’est-ce que c’est ?

Je me suis installée moi-même dans cette position d’élan, cette tension presque constante qui ne débouchait sur rien, rien du tout, jusqu’à ce que j’en ressente une forme d’épuisement physique, une contraction de tous les muscles qui me faisait presque trembler.
Celui qui prend son élan, doit s’élancer – voilà l’inférence évidente, en deçà de la pensée. Mais ça ne marchait pas.
C’est là que j’ai compris combien j’étais épuisée par cet élan virtuel interminable, et combien je lui en voulais d’être là, devant moi, de comprendre ce qui pourrait se passer mais de ne rien faire, et pas parce qu’il l’avait décidé, ça je l’aurais compris, mais par faiblesse, parce qu’il n’avait pas de force du tout, il savait guetter, être à l’affut, jouir de l’attente, et là encore, même pas par perversité, par faiblesse pure, jusqu’à ne plus jouir du tout donc, et la force de saisir, il ne l’avait pas, il en était loin, à une distance que je ne pouvais pas imaginer et il était là, empêtré dans sa faiblesse, prisonnier de ses velléités, si faible qu’il n’avait même pas la décence de se taire.
J’avais le sentiment d’une injustice dont il se rendait coupable envers lui-même, ou plutôt en vers la beauté de ce qui était possible.
Pourquoi parler de l’art des rencontres si c’est pour faire ça, finalement, c’est à dire pire que rien, parce que rien ça irait, pas de rencontre ce n’est pas grave, ce n’est pas comme ce voile, cette vapeur de presque quelque chose qui m’empêche de respirer qui me bouleverse. Pourquoi me faire inventer de nouveaux gestes, de nouveaux sens, me montrer l’écume blanche qui court sur la merveilleuse surface de l’eau et m’inviter ainsi pour finalement me tenir à l’écart ?
Je me fiche de ce que durent les choses, tant mieux qu’elles ne durent pas !  mais au moins qu’elles soient là un moment, juste un moment. Et puis après on verra. Je ne demande rien, je ne suis pas nostalgique {…} Après on verra"

 



( ce très beau roman de Jérôme Ferrari, auteur du Sermon sur la chute de Rome, Goncourt 2012, reparaît ce mois-ci aux éditions Actes Suds, il s’appelle Aleph Zéro, il est dédié entre autre à Mario Biancarelli, ce mystérieux nom de jeune fille de Madeleine, alors bonne fête grande mère. )

 

25 mai 2013

aux heures de bureau

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23 mai 2013

le cuivre c'est la base. #archive

Démonte le boitier. Fais sauter les dernières visses. Force un peu s’il le faut, on n’est jamais trop en avance. Tu atteins les circuits électriques. Le cuivre c’est la base. Tu repères les couleurs. Tu cherches le bleu. Tu as le droit de prendre un peu ton temps pour la teinte. Cherche le bon bleu. Prépare le fer à souder, découpe les fils qui doivent l’être. C’est un réseau de synapses, c’est comme si tu touchais directement au cerveau, tes gestes sont chirurgicaux, tu peux trembler, mais à voix basse. Maintenant fais se rejoindre les deux composants les plus éveillés. Puis referme tout, revisse. Personne ne doit soupçonner ton passage. Ta résistance est illisible, inclassable, innommable. Tu échappes au langage. Referme le boitier. Branche le. L’électricité c’est la deuxième base. Le goût du cuivre tu l’as dans la bouche. Le poste trouble toutes les fréquences. Tu peux parler où bon te semble, tu peux atteindre. C’est ici le plus délicat de l’affaire, il faut atteindre. Atteindre, c’est attendre, à une lettre près. C’est reléguer ses espérances au second plan de l’image,reléguer tout pouvoir, tout désir de puissance, ne pas les tenir en banderoles, savoir qu’elles cognent en sous-couche. Atteindre, tendre, attendre. Même combat. Emettre. Oui.

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NOUS NE VOULONS PAS ÊTRE LE SPECTACLE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

oui, non, bonjour, nous ne voulons pas faire le spectacle. nous ne sommes pas disponibles.merci.

stromboli.

22 mai 2013

.l'après-midi-le-faune.

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19 mai 2013

oui

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Traité d’invisibilité, grimoire sans pages.
La formule énoncée aurait été celle-ci :

 

Repère tes habitudes. Enamoure-les.
Puis déjoue-les une par une comme on découd le corset,
le paragraphe ou l’automne.
Abat tes habitudes. Enamoure-les
qu’elles rendent le sang,
revêt ton débardeur de lumière.
Bouche tes yeux, bouche tes narines,
avale un ail fumé et des poissons
et des fruits pour le jus et des sexes juteux.
Après,
Marche longtemps avec la sueur des nouveaux nés,
dans les rues les plus arides, les plus avides de sens.
Marche, et lentement,
fond.
Moque le diable moqueur en deux temps,
trois mouvements, un pas de danse obscur
et au croisement prends le croisement .

Tu refuseras le noir en peinture
s’il n’est pas matière au doute
et ne convoiteras l’invisibile
que parce qu’il te permet présence.
Car l’invisibilité est la voix.

Parle quand tu marches, parle quand tu dors,
parle quand tu tais, parle quand tu jouis, silencieux, d’une image.
Parle quand timidement____ Parle car tu es humain et le gars là-bas, pareil.
Ne parle pas visible. Circule.
Il n’y a rien à voir que boire ta propre ivresse
à jeun.
Des visages sont contenus dans tes cordes, donc chante aussi.

Tu remarqueras que déjà le tour s’est joué.
Tu flottes ancré dans le sol et tes paumes sont jaunes soleil.
Ce sont des dessins redéfinis que tu habites, impermanents et pugnaces. Invisibles mais
sentis.

 

Referme le livre et ne compte que ton battement.
Ce que tu vois moi je le parle, mais je ne dis jamais tout.
Les formules n’enseignent ni ne guident,
elles enflamment. Alors à la fin

__brûle.


¨

 

17 mai 2013

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Prosternez-vous ou mourez chaque fois, le gars émiette les mots entre canines et incisives et gros dentier greffé la veille. Il chouchoute le tapis de velours rouge, serre fort sa cravate, la fourmilière de ses idées, le chaos et la bourse qui défilent sur grand écran. Une dame entre. Robe fourreau. Le casino la déshabille. Aussi vite que ça. Elle passe, allure de chatte au cœur mou, entend le croupier dire, à la volée, « Prosternez-vous ou mourez chaque fois ». La règle d’un jeu que je ne connais pas, se dit-elle, se dit-elle, se dit-elle. Elle c’est comment déjà ?

Personne ne sait, elle disparaît. Tout le monde joue. Tout le monde a une petite bourse cousue près du sexe, en peau de lapin, ou autre chose de mort, et l’argent y est remplacé par des jetons de plastique jaune. Le délice. A la table du croupier les joueurs accourent, se giflent pour être au premier rang, si c’est pas jouer c’est pour voir. Ils ont des chaines noires, plates, au cou, qui ne brillent pas, c’est vulgaire.

En secret un homme, plus beau plus mat mais moins grand, pense que ce soir, c’est idéal, la lune au beau fixe pour vider la chambre forte. Il se voûte et fait semblant de jouer  gros. La roulette. Branlette. Mélange les rouges avec les noirs. Le sommeil dans le sillage de la boule endiablée.
"Ralentissez-la" crie un joueur au bout du tapis.
"Accélérez-là", glisse la femme qui avait disparu.
«Au diable son gros gâteau» abandonne le troisième homme en riant, c’est à la table d’à côté qu’il file, où le blackjack attend.

 

 


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